Benoît Costil, 6 ans de - très - bons et loyaux services.

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À l’instar de Pierrick Hiard ou Petr Čech, Benoît Costil aura marqué l’histoire des gardiens de légende du Stade Rennais F.C. Passé du statut de meilleur gardien de Ligue 2 à numéro 2 des portiers en Équipe de France, Benoît Costil a décidé de poursuivre sa carrière dans un nouveau club. Avec sa sincérité habituelle, « Ben » revient sur son formidable parcours en Rouge et Noir.

Benoît, ton aventure rennaise s’arrête donc cette saison…

J’étais dans une situation de fin de contrat et j’ai annoncé il y a peu de temps au Président que je quitterai le club à l’issue de la saison. Ça me fait quelque chose forcément. Ce ne sont pas des décisions que l’on prend facilement. J’ai défendu fièrement les couleurs du club. J’ai connu beaucoup de choses, pas toujours faciles mais c’est dans ces moments que l’on s’attache encore plus au club. Le Président a eu une bonne réaction et ça m’a soulagé.

Quand as-tu pris cette décision ?

Je l’ai prise seul l’été dernier à l’issue d’une fin de saison délicate. Derrière il y a eu l’arrivée de Christian Gourcuff, un homme formidable, un grand coach. Avec sa volonté que je reste, je me suis malgré tout posé la question et c’était finalement plus fort que moi. J’ai estimé qu’il me fallait une nouvelle aventure, donner un nouvel élan à ma carrière. J’aurais pu être le recordman de matchs joués avec le club, « La Danze » (ndlr : Romain Danzé) avait peur (rires), mais ça fait partie de la vie d’un footballeur et d’un club. Il y a des choses qu’il faut faire en temps et en heure. C’est une décision que j’assume pleinement. Il ne faut pas se tromper, il n’y a pas de haine, il n’y a que de l’amour envers le club.

Tu restes sur ta faim avec le Stade Rennais F.C. ?

J’ai de très bons rapports avec le club. Il y a un lien fort, je respecte et j’aime le Stade Rennais, la ville et la région. Je ne peux pas passer l’éponge. Cette saison, la philosophie et le travail de Christian Gourcuff m’ont plu. Je suis complètement fan de l’homme. Il m’a compris. Le feeling a été très bon dès le début. Je regrette même de ne pas l’avoir connu plus tôt. Après j’aurai préféré avoir de meilleurs résultats et que l’on finisse plus haut avec un classement plus proche de l’époque où je suis arrivé au club.

Découvrir à la fois la Ligue 1 et l’Équipe de France dans un seul et même club, c’est un parcours brillant !

Même si j’avais été élu meilleur gardien de Ligue 2, j’arrivais quand même dans un club qui jouait l’Europe. Il fallait se faire sa place. Ce n’était pas facile, j’avais une vraie pression de la part du coach. Je dois énormément à Christophe Revel (ndlr : entraîneur des gardiens), il a mis son poste en jeu pour me faire venir. Si je n’avais pas été bon, on se serait séparé de nous deux, très clairement. Il a fait preuve de beaucoup de courage, il avait des convictions. J’ai fait ce qu’il fallait et le Stade Rennais m’a fait grandir, il m’a beaucoup aidé, il m’a fait devenir un gardien de Ligue 1 puis il y a eu la sélection. Je suis heureux d’être devenu international et fier d’être allé à l’Euro en étant joueur du Stade Rennais F.C. C’est aussi une belle récompense pour le club.

Quel rôle a eu Christophe Revel, ton entraîneur ?

On s’est connu un an à Vannes en tant que coéquipiers. Pendant mon époque sedanaise, on s’est un peu perdu de vue, puis lors de ma dernière saison à Sedan il m’a appelé pour savoir comment ça se passait pour moi. Je me suis dit qu’il avait un truc derrière la tête, sans trop espérer non plus. Il s’est mis en danger. Quand il croit en quelque chose, il y va jusqu’au bout. Il ne vous lâche pas à mi-chemin. Il est hyper compétent, très créatif, curieux, bosseur. C’est une référence en France. Il peut très vite en devenir une en Europe. C’est un grand entraîneur des gardiens. On a besoin tous les deux d’un nouveau challenge, de se séparer et de se revoir dans six mois place des Lices et passer un moment agréable. Il a aussi besoin d’un nouveau défi à Rennes.

As-tu des regrets ?

Quand je suis arrivé à Rennes, je ne savais pas quand j’allais partir. J’avais une référence, c’était Petr Čech. Il n’a fait que deux ans ici mais il est parti comme un héros. Le « Au Revoir » et la haie d’honneur qu’il a reçus quand il est parti, c’était exceptionnel. Je m’étais dit que je n’aurai jamais sa carrière mais je rêvais d’une chose, c’est de gagner un trophée. Ce sera un grand regret car je m’y voyais tellement. La dernière finale perdue face à Guingamp, on n’avait pas le droit de la jouer comme ça. Quand j’en parle, j’ai les nerfs.

Et tes plus belles émotions ?

C’est surtout la première année. Il y a le déplacement à Belgrade en 2011, un truc surpuissant, et le match à Marseille quand on gagne 1-0. Il me fallait un match référence, c’est le match qui me donne du crédit auprès de mon entraîneur, mes coéquipiers et la France du foot. Il y a les matchs au Roazhon Park contre le Celtic Glasgow et l’Atletico Madrid. Le stade n’était pas complètement plein mais il y avait un bruit incroyable. Je revois encore la frappe de Víctor Hugo Montaño qui bat Thibaut Courtois. C’était génial ! La demi-finale contre Montpellier était un moment fort avec l’envahissement du terrain. Le foot, il faut le vivre. Il faut savourer ces moments.

En tant que fin connaisseur du Stade Rennais F.C., que manque t-il pour gravir une marche supplémentaire ?

Les jugements et la méchanceté sur le club me dérangent. Les gens qui critiquent rêveraient d’y être. Oui ça pourrait être mieux il ne faut trop en demander non plus. En France, il y a des clubs plus armés financièrement. Il faut laisser le temps au temps et il faut surtout faire confiance au coach. C’est une vraie chance de l’avoir. Il faut en avoir conscience. Il faut lui laisser le temps de bâtir son effectif et lui inculquer ses principes de jeu. Il faut lui laisser les clés et le laisser travailler pour trouver la stabilité et un classement un peu plus haut qui flirtera avec l’Europe. C’est un club qui travaille bien, qui a tout pour être cinquième ou sixième. Il y a un bon centre d’entraînement, un super stade, un public qui est présent. Il y a beaucoup de personnes qui aiment le Stade Rennais. C’est peut être pour ça qu’on en parle autant et qu’on critique autant.

Tu penses à cette dernière fois où tu vas porter ce maillot Rouge et Noir ?

Les dix dernières minutes, ça va être un compte à rebours. J’ai la chair de poule rien que d’y penser. Rennes représente énormément de choses. Je pense que sur les dernières années rennaises, il n’y a pas d’autre joueur qui a vécu sa période comme moi je l’ai vécue. C’est à dire, en vivant, tout simplement, en ayant autant d’amis, en me promenant tranquillement dans les rues de Rennes. Les gens ne me calculent pas, je fais partie du décor. J’habitais en ville. Rennes est devenue ma maison, c’est chez moi, ça dépasse le job. J’adore ces couleurs. C’est un club qui restera tout le temps en moi. Il n’y a pas eu de trophée mais plein d’émotions. Le Stade Rennais F.C. m’aura marqué de manière très importante. Le Roazhon Park, c’est mon jardin. Je me sens chez moi, j’ai mes marques. Les sièges rouges ont tout changé. J’adore être dans le but près du RCK. Les gens que je croisais, que je saluais en arrivant au stade vont me manquer.

Qui vois-tu pour te succéder dans les buts ?

Je ne suis pas inquiet pour le club. La place appartiendra à quelqu’un qui aura envie de bien faire et que l’on doit soutenir. La place était lourde à assumer pour moi quand je suis arrivé après Nicolas Douchez. J’espère que ce sera Abdoulaye Diallo ou Raïs M’Bolhi parce que je les ai côtoyés, je connais les hommes. J’espère qu’un jour ce sera Edvinas Gertmonas et qu’un jour les buts seront gardés par un petit de l’Académie.

Entretien Benoît Costil