Jérémy Gélin : « tirer un trait sur cette blessure »

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Victime, en juillet dernier, d’une rupture du ligament croisé antérieur du genou gauche en préparation des JO 2021 avec l’Équipe de France, le défenseur rennais formé au club vit une saison blanche. Une épreuve physique et mentale qu’il doit surmonter en marge du groupe pro et qui espérons le lui permettra de se forger un moral d’acier pour son avenir. Jérémy Gélin se confie.



Jérémy, on t’a vu il y a eu peu de temps sur les terrains avec les pros. C’est le début d’un retour ?
Il y a eu la possibilité de m’intégrer sur une reprise technique, du tennis-ballon et un circuit de passes. J’ai beaucoup été avec la réserve ces dernières semaines. Avec eux, la partie technique dure un peu plus longtemps. Ça permet de faire des gammes. Après une longue blessure, ça ne va jamais comme on veut. Il y a des hauts et des bas. Je suis dans un bas actuellement, ce n’est pas facile. En espérant que ça se passe bien d’ici la fin de saison.

Le temps est long ?
Franchement, c’est dur. À chaque fois que l’on se sent proche du groupe, il y a toujours un petit truc qui vient freiner le moment de reprise. Ce n’est pas facile.

C’est toute une machine qu’il faut remettre en route…
Tu te sens bien et tu te dis, c’est bon tu peux le faire, puis quand tu passes à l’étape supérieure, tu te rends compte que tu n’es pas forcément prêt. C’est là où c’est un peu compliqué et frustrant pour moi car j’ai des objectifs personnels. J’ai envie de passer à autre chose et tirer un trait sur cette blessure. Il faut essayer d’avancer malgré les petites douleurs.

Quel est ton quotidien actuellement ?
Je fais pas mal de travail technique avec la réserve et je suis en spécifique avec un préparateur physique du club pour travailler les accélérations. Je suis aussi en salle, je fais un peu de tout. J’ai retrouvé le ballon au début de l’année et le groupe de la réserve il y a trois semaines. Retrouver un groupe et faire des passes à d’autres joueurs, ça a fait du bien.

Tu as retrouvé des sensations lors de ces séances ?
Oui, j’ai retrouvé le goût à faire de bonnes passes, du jeu long... Ça va se peaufiner avec le temps.
 

« C’est une épreuve dans la vie d’un footballeur. »


Cette blessure est intervenue avec la sélection tricolore avant les Jeux Olympiques. Est-ce arrivé au pire des moments selon toi ?
C’est la fatalité de la chose, au moment où il ne fallait vraiment pas, au moment où j’allais jouer une compétition internationale. C’est dur que ça arrive à un an du terme de mon contrat. Ce n’était pas le bon moment. Je vais être libre à la fin de la saison donc ça tourne un peu dans ma tête. Ça n’arrive jamais au bon moment de toute façon. J’ai appris qu’un ami s’est aussi fait les croisés dans la semaine, Olivier Boscagli du PSV Eindhoven. C’est une épreuve dans la vie d’un footballeur.

C’est aussi intervenu au terme d’un prêt à Anvers. Comment s’était-il passé ?
J’étais sur une dynamique différente de celle du Stade Rennais. Ça m’a ouvert l’esprit sur le fait de travailler encore plus. On peut se dire que je suis descendu en gamme en termes de club et de structure mais je me suis recentré sur moi-même, le jeu. J’avais besoin de temps de jeu, de prendre du plaisir et de la confiance. Choses qui se sont passées. On a bien joué et on a fait une belle campagne en Europa League. C’est un prêt qui m’a apporté pas mal de choses, sur le plan personnel et celui du foot. Ça m’a permis de gommer des imperfections dans le jeu. Quand tu pars à l’étranger, tu es livré à toi-même. C’est toi et toi seul. Quand tu viens d’un bon club européen comme le Stade Rennais, il faut prouver et être le meilleur. C’est comme ça que j’ai essayé de me challenger et de reprendre confiance.

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À 24 ans, tout est encore possible !
Oui c’est sûr. Je suis encore jeune pour le poste où je prétends jouer. On verra comment je me sors de cette blessure mais je veux repartir de l’avant.

Tu as réalisé de très bons matchs à Rennes, que ce soit au milieu ou derrière. Tu souhaites retrouver ce niveau ?
C’est toute la complexité de la blessure. Ça fait bientôt neuf mois que je suis hors-jeu. J’espère que ce que j’ai réussi à faire auparavant avec le Stade Rennais ou même avec Anvers sera resté dans les mémoires et que ça me serve pour un tremplin ou autre chose.
 

« Je suis chanceux dans mon malheur. »


Tu es devenu papa en septembre. Comment as-tu accueilli cette naissance ?
Ça m’a fait du bien car ça demande beaucoup de choses, beaucoup de temps, beaucoup d’aide pour la maman. J’avais l’esprit concentré sur autre chose.

Tu as pu profiter de ton fils. C’est sans doute le seul point positif de cette longue convalescence ?
Je suis chanceux dans mon malheur. Avec un rythme normal de footballeur, je n’aurais peut-être pas pu assister à l’accouchement. J’ai pu aider et en profiter. Quand tu pars en mise au vert et que tu joues tous les trois jours, tu ne vois pas forcément ton enfant grandir, les choses de la vie. J’ai eu un rythme différent. La vie a changé, ça permet de passer un cap dans la tête. On devient un peu plus adulte. On a plus de responsabilités. On ne joue plus au foot que pour soi.

Tu as reçu beaucoup de soutien au sein du club ?
Oui, j’ai eu du temps pour échanger et avoir des discussions avec toutes les personnes du club, que ce soit au sportif ou à l’administratif. Avec beaucoup de joueurs aussi ou des anciens comme Romain Danzé qui a déjà vécu ça. Ils me permettent de garder espoir. Savoir que l’on n’est pas tout seul, ça fait du bien. Le meilleur soutien que j’ai eu, c’est celui de ma famille, de ma compagne et de mon fils.

Les supporters sur les réseaux sociaux demandent souvent de tes nouvelles. Ça doit faire chaud au cœur ?
Je reçois pas mal de messages sur mes réseaux. Ils se demandent où j’en suis. C’est forcément touchant et appréciable. Ça prouve que l’on peut manquer à certains. C’est une question d’égo mais c’est pour ça que l’on fait du foot, c’est pour donner du plaisir aux gens. Quand tu es dans le dur, les gens te le rendent plutôt bien. J’ai hâte de dire que je suis revenu dans le groupe ou que j’ai fait un match avec la réserve. J’espère le plus rapidement possible. De semaine en semaine, ça se rapproche. Si je peux gratter un groupe ou deux, ce sera la récompense des neuf mois de galère.
 

« Honnêtement, au stade, c’est un kiff. »


Tu sembles avoir des fourmis dans les jambes…
Vous ne pouvez pas imaginer. Quand j’arrive à la Piverdière le matin, j’ai les jambes en feu. J’ai envie d’aller m’entraîner, encore plus quand tu vois les autres sur le terrain. Le coach fait les choses bien. Il nous intègre aussi, nous les blessés, aux séances vidéo. Peu importe, j’ai envie de retrouver le goût du foot. Quand on est privé de ça pendant une longue période, on se dit : maintenant c’est bon. J’ai envie de m’épanouir, de retrouver les mises au vert, travailler toute la semaine avec l’objectif du match. Les objectifs sportifs me manquent. Quand je suis au Roazhon Park, je n’ai qu’une envie, c’est d’être au milieu du terrain. En plus les ambiances au stade sont incroyables.

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Tu as vu tous les matchs au Roazhon Park cette saison ?
Beaucoup oui. Quand les horaires n’étaient pas simples pour mon fils, on le laissait à la belle-famille ou on restait à la maison devant la télé. Mais dès que je pouvais aller au Roazhon Park, j’y allais. Honnêtement, au stade, c’est un kiff. J’adore voir les gars jouer même si c’est dur pour moi. Je bouillonne. L’équipe joue bien, l’ambiance est magnifique, les résultats sont bons. Il y a sûrement une belle fin de saison à jouer.

Que penses-tu du jeu développé ?
C’est incroyable ! On a passé un cap parce que le collectif est plus fort que l’individu. On sent que la « hype » autour du club a augmenté cette saison. On n’a rien à envier à personne. On est bien positionné. J’espère que ça va durer et que le Stade Rennais F.C. sera un prétendant régulier à la Ligue des Champions. C’est mon club de cœur et ça le sera toujours.

Regrettes-tu de n’avoir pu travailler avec Bruno Genesio ?
Oui, je ne vais pas mentir. Ça m’embête car je sais que ça aurait pu matcher. Humainement, ça me parle beaucoup. Il est proche de mes valeurs. On parle furtivement ensemble, il prend des nouvelles de moi quand je suis en salle. Mais oui, c’est un regret personnel. J’aurais aimé l’avoir au quotidien dans une saison et savoir ce qu’il aurait pu m’apporter.