Entretien avec Frédéric de Saint-Sernin : Partie I

Une nouvelle fois, le Stade Rennais F.C. a terminé la saison dans le premier tiers du championnat. Fier de la stabilité du club breton, le président Frédéric de Saint-Sernin revient sur une saison riche en émotions.

Partager
11142.jpg

Président de Saint-Sernin, quelles émotions vous a procuré le Stade Rennais F.C. cette saison ?
On a eu une saison plutôt contrastée avec beaucoup de hauts et quelques bas. Cela a été une saison pleine d'émotions. Il y a eu quelques surprises et pas mal de tensions. Au final, on sort de cette saison rassurés sur le groupe que l'on avait constitué. Les joueurs d'expérience qu'on a mis en place autour de notre équipe de jeunes pour plus de complémentarité et de poids dans certaines situations ont apporté satisfaction. Je pense que les résultats de cette saison et la manière dont ce sont comportés ces jeunes ont validé ces choix là. Au delà du groupe, c'est le club qui s'est renforcé dans la difficulté. Quand tout va bien, on ne se remet pas obligatoirement en cause et c'est peut être l'erreur. C'est quand ça va bien qu'il faut prendre des décisions et faire des choix. Dans les moments difficiles sur le plan sportif, nous avons pris des décisions pour remodeler notre organisation. Tout s'est opéré dans une relative sérénité alors que les résultats étaient négatifs pour nous. On a réussi à franchir ce cap troublé. La qualité de Guy Lacombe et sa complémentarité avec Pierre Dréossi ont fait que le club n'a pas souffert. Le vestiaire n'a pas été marqué par des tensions. Je pense que ce que l'on a vécu cet hiver, dans d'autres clubs, cela aurait pu créer des situations de crise. Nous avons réussi à prendre des décisions fortes pour le club. Ces périodes délicates ont renforcé non seulement le groupe mais aussi l'ensemble du club.


Avez-vous été inquiet lors de la série noire des « Rouge et Noir » fin 2007 ?
Oui mais je suis quelqu'un d'optimiste globalement et d'inquiet pendant 90 minutes. J'étais inquiet quand on perdait des matches. Le lendemain, je voyais toujours une lueur d'optimisme. D'abord parce que je croyais dans ce groupe qui ne pouvait pas être mauvais puisque le début de saison avait été très bon. Je croyais aussi en la qualité de notre staff sportif parce qu'on se connaissait depuis longtemps et c'était probablement ce lien fort de fidélité entre le staff sportif et le club qui était un gage de pérennité pour le club. Mais à partir du moment où nous avons décidé Pierre et moi de modifier notre organisation sportive, il y a eu des choix difficiles. Nous avons malheureusement dû nous séparer de nos entraîneurs adjoints. C'était pour l'intérêt du club. Il fallait le faire et l'assumer. Quand on voit la suite de la saison, on se dit que ces choix ont été les bons. Ils ont été opportuns et décidés au bon moment. Nous étions au bout d'une logique avec Pierre et nous avons décidé de la modifier. Même si elles sont difficiles à prendre pour des raisons humaines. Il en va de l'intérêt du club. Je suis garant de l'avenir de ce club. Il faut prendre des décisions et quand le cours des choses vous donne raison, finalement vous êtes satisfait.


Pensez-vous que la meilleure solution pour le club est de s'organiser autour d'un trio président, manager général et entraîneur ?
Je suis arrivé au Stade Rennais F.C. où il y a avait un couple de formé entre le manager général/entraîneur et le président. Je n'ai pas souhaité remettre en cause cette organisation d'autant qu'elle a donné à mon arrivée de bons résultats sur le plan sportif et entière satisfaction sur le plan de ma relation avec Pierre Dréossi. Je ne voyais pas l'intérêt de changer sinon de nous renforcer dans notre staff. Nous avons commencé la saison 2007/2008 sans avoir été complètement satisfait d'avoir ce que l'on voulait mettre en place. Mais avec un mercato qui nous paraissait réussi sur le papier et un début de saison tonitruant, on s'est finalement dit : continuons comme cela. Mais à partir du moment où il a fallu modifier les choses, pour ma part je me suis adapté à une organisation plus traditionnelle. Ce qui est important c'est que cela marche. Nous nous sommes adaptés aux circonstances et comme les résultats sont là, l'année prochaine nous allons poursuivre dans ce sens dans la fidélité des uns et des autres avec Guy, Pierre et moi-même.


Pour votre première saison pleine en tant que Président, avez-vous une nouvelle approche du milieu ?
Probablement. Je suis arrivé au début avec l'enthousiasme d'un amoureux du football, d'un amateur au vrai sens du terme. Je suis devenu un professionnel du football. L'enthousiasme existe toujours car j'aime profondément ce sport mais l'approche est plus pragmatique et plus rigoureuse car on a la pérennité d'un club centenaire sur ses épaules qui compte profondément dans une région de football comme la Bretagne. Etre amateur au sens enthousiaste du terme doit être relativisé par le fait que l'on doit prendre des décisions que je qualifie de professionnelles. Il faut respecter des équilibres financiers. Quand vous êtes amateur de football, vous lisez les gazettes le matin en période de mercato en vous disant " Qui va-t-on acheter ? ". Quand vous êtes président d'un club, vous avez des comptes à rendre à l'actionnaire. L'enthousiasme doit être tempéré par une bonne dose de professionnalisme.


Considérez-vous un club de football plus comme une institution sportive ou une entreprise ?
Les deux. Le football cela doit être d'abord une joie partagée de voir des joueurs avec un esprit d'équipe pratiquer le sport le plus populaire du monde. Je tiens beaucoup à l'esprit collectif. Ces dernières années, les clubs de football ont été frappés par certains excès. Certains maux ont été gommés il y a trois ans grâce aux droits télés. Il y a plusieurs années, beaucoup de clubs étaient en difficulté financière. On ne s'en apercevait pas car le football était un peu « paillette ». Aujourd'hui, la plupart des clubs professionnels sont équilibrés sur le plan financier. On en revient à cette notion d'entreprise. Je sais que les supporters n'aiment pas beaucoup ce mot. Mais sans équilibre, on s'endette et on ne peut pas offrir de spectacle. Avec le club, je n'ai pas envie de vivre au dessus de nos moyens. Ce n'est pas la mission qui m'a été assignée. La passion, le sport, la jeunesse, l'engouement collectif mais aussi un peu de raison, voilà comment je pourrais qualifier le football.