Dimanche 30 octobre à l’occasion de la réception de Metz, Bernard Gouédo, Président du club de supporters des Socios, a bouclé sa quarantième année de match au Stade Rennais F.C. Une série qui a commencé en 1976 et qui n’est pas prête de s’arrêter. Depuis son retour à Rennes, ce Morbihannais n’a manqué aucun match des Rouge et Noir et compte à son actif plus de 1.000 matchs !
Quarante ans de matchs au Stade Rennais F.C., Bernard Gouedo est un inconditionnel des Rouge et Noir, un aficionado aux mille souvenirs. Marinière aux couleurs de son club de cœur sur les épaules, il nous a ouvert les portes de son local. Maillots, posters, écharpes, murs en Rouge et Noir, nous ne sommes pas dans un musée mais presque.
Bernard, pouvez-vous vous présenter à celles et ceux qui vous ne connaissent pas encore ?
Je suis natif du Morbihan. J’ai passé toute ma jeunesse à Josselin, j’allais régulièrement à Rennes voir les matchs. Puis j’ai fait carrière à La Poste à Paris. À l’époque, les matchs étaient à 20h30, je prenais le train à 14h30 gare Montparnasse. J’arrivais à 18h30 en gare de Rennes et je rentrais à 2h du matin sur Paris. Quand le club se déplaçait à 300/400 km de Paris, je prenais ma voiture avec ma femme et on allait encourager le Stade Rennais. Puis en 1976, j’ai été muté à Rennes, c’est à ce moment-là que j’ai commencé à compter les années. Dimanche soir à l’issue du match face à Metz j’ai bouclé ma quarantième année consécutive. Je n’ai manqué aucune rencontre depuis le match nul deux partout entre Rennes et Sochaux, c’était la 13ème journée de championnat, c’était le 6 novembre 1976. J’ai également été speaker pendant 10 ans. J’ai commencé comme assistant puis j’ai fini par prendre le micro. J’ai également été Président du club de supporter « Allez-Rennes » mais aussi membre du conseil d’administration du Stade Rennais F.C. de 1980 à 1985 et vice-Président de la section animation. Enfin depuis 2005, je suis Président du club des Socios
Vous souvenez vous de votre premier match à Rennes ?
Ça date. C’est trop lointain mais je me souviens de mon premier déplacement, c’était à Sedan. Il n’y avait pas de club de supporters sur Paris alors je partais avec mon écharpe en déplacement pour qu’on puisse me reconnaître sur place. Il y a aussi eu un match amical en 1962 entre le Stade et le Red Star, c’était mon premier match à Paris. Au fur et à mesure de faire des déplacements, je me suis rendu compte que je n’étais pas seul à encourager les Rouge et Noir.

C’est à ce moment-là qu’est né le club de Socios ?
Le club « Les Socios » est né vingt ans après la création du club de supporters du Stade Rennais Paris et Région Parisienne qui a compté jusque 1.000 adhérents. À chaque match, on se déplaçait avec deux bus pour encourager notre équipe. Cette idée de club de supporters à Paris a vu le jour lorsque j’ai appris qu’il existait un club de supporter de l’Olympique de Marseille près de chez moi. Pourquoi l’OM et pas le Stade Rennais ? Le club « Les Socios » a vu le jour en 1992 après avoir rencontré Gérard Aubaud qui avait comme projet de créer un club de supporters à Rennes. Maintenant j’occupe le rôle de Président. J’ai pensé prendre du recul car j’estimais avoir consacré beaucoup de temps mais c’est ma femme qui m’a poussé à continuer.
Et toutes ces années derrière le Stade Rennais F.C. n’a jamais eu d’effets néfastes sur votre vie de famille ?
J’ai toujours réussi à concilier ma passion et ma vie de famille. Beaucoup de personnes me parlent de sacrifices mais je préfère le mot plaisir. Et la devise du club des Socios que j’ai écrite me colle à la peau : « Une vie, une passion, un club, le Stade Rennais Football Club ».
D’où vient cet attachement au club ? C’est une passion familiale ?
Tout gamin j’avais l’occasion d’aller voir les matchs du fait que le vice-Président du club était Josselinais comme moi. Dans la famille, on suit les performances du Stade Rennais F.C., malheureusement je n’ai pas réussi à la convertir.
Que représente pour vous le Stade Rennais F.C. ?
Le Stade Rennais F.C est devenu ni plus ni moins qu’une drogue. À la maison, je suis équipé. Je ne louperais jamais un match à la télévision. Les technologies d’aujourd’hui nous permettent de voir tous les matchs, j’en profite, ce qui n’était pas le cas dans les années 60-70.
Vous avez vécu 14 ans à Paris, comment suiviez-vous les matchs ?
Lorsque j’avais l’opportunité de descendre en province, je prenais le train sinon on se réunissait tous les samedis dans un bar-restaurant parisien, l’Arnauline (siège du club des supporter Paris et Région Parisienne) entre supporters rennais pour écouter le match à la radio. Je me souviens d’une soirée du 3 juin 1974, c’était le soir de la rétrogradation en deuxième division, on avait tous pris un vrai coup sur la tête.

Quels sont les joueurs qui vous ont le plus marqué ?
Ils sont nombreux, la liste est longue. Le contexte supporter/joueur a beaucoup changé. A l’époque on avait un contact direct qui est moins présent ces dernières années. Un joueur qui m’a marqué c’est Karel Bonsink. Le jour de son départ pour Hong-Kong, il nous a invités à fêter son transfert avec lui. Gelson Fernandes nous rend visite régulièrement au local. Benoît Costil, Julien Férêt et Vincent Pajot sont passés nous saluer. Je n’oublierai pas les passages de Laurent Pokou, Patrick Rampillon, Alexander Frei, Marco Grassi ou Shabani Nonda pour ne citer qu’eux.
Des souvenirs vous en avez des centaines, peut-être même des milliers. Quels ont été les temps forts de ces quarante dernières années ?
Forcément, il y a eu l’éclosion d’Ousmane Dembélé la saison dernière. Je trouve dommage qu’il n’est fait qu’une partie de saison, peut-être qu’en réalisant une saison entière nous aurions pu accrocher une place européenne. Il y a aussi ces matchs de Ligue Europa et notamment le déplacement à Osasuna, à Bâle et à Glasgow qu’on avait fait en car.
Mon premier souvenir reste la finale de coupe en 1965 mais le vrai temps fort c’était la demi-finale à Paris contre St-Etienne le 30 avril 1965. C’était du grand football. Avec Jean Prouff aux commandes on ne pouvait pas rêver mieux. Evidemment, il y a eu 1971. J’avais pris trois jours de congés pour voir la demi-finale. Marcel Aubour nous a sorti le grand jeu face l’OM. C’était magnifique. On avait une équipe sympathique à l’époque, on connaissait tous les joueurs. Il y a eu envahissement de terrain, champagne en tribune Vilaine… On joue la finale, on la gagne 1-0, c’était la fête pendant une semaine à Rennes. C’était grandiose. Le samedi, on fêtait la coupe en championnat à Reims, j’avais fait le retour à Paris avec une bouteille de champagne offerte par Robert Rico.
Saison 76/77, il y avait un match de Coupe de France à Niort. Un car payé par le club de supporters était attendu à 9h devant le bar « Chez Manu », aujourd’hui « Le Valy » face au Roazhon Park. Il n’est jamais venu. On est parti chacun avec notre voiture et on a emmené les joueurs à Niort. J’en avais trois joueurs dans ma voiture : Léon Maier, Hervé Guermer et … (il ne souvient plus du troisième).
Je n’oublierai pas le quadruplé d’Alexander Frei face à l’OM, les victoires face à Nantes, et cet exploit à Paris à 9 vs 11. On gagne 2-1. On a tellement poussé derrière notre équipe qu’au retour à Rennes, dans le bus, il n’y avait pas un mot tellement on était épuisé. Alors que ça aurait dû être une fête.

Quel est votre pire souvenir ?
Pendant de nombreuses saisons, le Stade Rennais F.C. a fait l’ascenseur. Les descentes en deuxième division ne sont jamais des passes agréables à vivre. Il y a des défaites qu’on préférerait oublier. Ma plus grande déception, c’est la descente en 1974. On était 4ème à la trêve puis nous nous sommes écroulés et on a été relégué. On a eu du mal à s’en relever.
Votre plus grand rêve ?
Un titre de champion de France, une nouvelle victoire en coupe. Ça procure des émotions tellement grandes. Envahir une nouvelle fois la pelouse du Roazhon Park, je n’attends que ça.
Si vous étiez un entraîneur ?
Christian Gourcuff, pour la qualité du jeu pratiqué par ses équipes.
Si vous étiez un gardien ?
Marcel Aubour, sans hésitation. Il avait un super état d’esprit.
Si vous étiez un défenseur ?
J’en ai vu tellement. Je dirais John Mensah !
Si vous étiez un milieu de terrain, un meneur de jeu ?
Raymond Kerusoré, Patrick Delamontagne. Il y en a eu d’autres. Yoann Gourcuff !
Si vous étiez un attaquant ?
Ousmane Dembélé. Je pense qu’il fera une grande carrière. Il est complet, il a la vitesse, il est technique et il marque des buts. Et Laurent Pokou !